Par Me Pierre-Alexis Bombardier et Me Clément Lucas
La Cour examine la recevabilité des vidéos de surveillance dans une affaire de violation alléguée des droits fondamentaux en copropriété, en déterminant que l’exclusion des vidéos pourrait compromettre la recherche de la vérité, malgré leur atteinte à la vie privée et aux procédures judiciaires.
Le jugement interlocutoire à l’étude concerne la recevabilité d’éléments de preuve, soit des images vidéo captées entre le 8 mai et le 13 mai 2023 par les caméras d’un syndicat de copropriété. Les demandeurs souhaitent produire lesdits vidéos aux fins de leurs réclamations respectives relatives à la violation alléguée de leurs droits fondamentaux, dont notamment l’intégrité physique et psychologique.
Considérant ce qui précède, la Cour doit trancher afin de déterminer si les deux conditions cumulatives pour rejeter un élément de preuve sont réunies (article 2858 du Code civil du Québec), soit une preuve obtenue dans des conditions qui portent atteinte aux droits et fondamentaux et une utilisation de la preuve susceptible de déconsidérer l’administration de la justice. Le Tribunal affirme d’abord que la captation d’images par les « caméras de surveillance (gym, stationnements et piscine) constitue une atteinte au droit à la vie privée ».
Elle ajoute à ce qui précède que les demandeurs ont obtenu les images « dans des conditions qui portent atteinte aux droits et libertés ». En effet, les demandeurs ont fait fit d’un jugement rendu préalablement en visionnant et déposant au greffe de la Cour les vidéos, le tout sans ordonnance. Ce qui précède n’est toutefois pas suffisant pour déclarer le rejet de la production des vidéos. À cet égard, la Cour rappelle que « […] la recherche de la vérité demeure le principe cardinal de la conduite de l’instance civile » et que, conséquemment, c’est « plutôt l’exclusion des bandes vidéo qui serait susceptible de déconsidérer l’administration de la justice », les bandes vidéos étant pertinentes afin de trancher quant à l’existence des graves violations alléguées.
À titre d’obiter, la Cour précise que bien que la captation d’image des parties communes constitue une atteinte au droit à la vie privée, une telle atteinte peut être justifiée dans le cadre de la vie en copropriété, et ce, en considération, notamment, des enjeux de sécurité. Ainsi, il ne faut pas, à notre avis, considérer qu’il est interdit pour les syndicats de copropriété de filmer les espaces communs, mais bien qu’une telle activité doit être justifiée tel que plus amplement expliqué dans l’un de nos précédents articles.
La Cour se penche sur la restitution par un syndicat de copropriété des remboursements de taxes municipales et scolaires ainsi que des sommes forfaitaires reçues, en confirmant que ces montants doivent être remis aux copropriétaires, et ce, considérant que ceux-ci ne sont pas des charges communes.
Deux (2) copropriétaires cherchent compensation face à leur syndicat de copropriété suivant l’entente entre ce dernier, les copropriétaires et leur municipalité. Dans le cadre du présent dossier, le Syndicat agit, suivant la décision des copropriétaires, à titre de mandataire (article 2130 du Code civil du Québec) pour les copropriétaires mandats, et ce, aux fins du paiement des taxes municipales et scolaires de ces derniers.
À tout évènement, c’est l’interprétation que retient la Cour de la preuve administrée, dont la déclaration de copropriété. La Cour explique à cet égard que les taxes municipales et scolaires étant afférentes à chaque unité de copropriété, elles ne constituent pas des charges communes.
Ainsi, les sommes transmises par la Ville, à titre de remboursement du trop-payé (à titre de taxes [1]) au syndicat de copropriété ne constituent pas des sommes que le syndicat peut conserver, mais bien des sommes remises au syndicat au bénéfice des copropriétaires. Conséquemment, « le Syndicat était tenu de remettre à messieurs Nolin et Lavigne le montant versé par ceux-ci au Syndicat pour le paiement des taxes scolaires ».
Il en va de même quant à l’obtention par le Syndicat, toujours dans le cadre de l’entente avec la Ville, d’un montant forfaitaire de 2 500$ pour les troubles, ennuis et inconvénients vécus par le syndicat et les copropriétaires. Le Syndicat ne pouvait pas accaparer cette somme, elle doit la remettre aux copropriétaires visées en proportion du droit de chacun.
[1] Il est important de noter que dans le cadre du jugement à l’étude, seule les taxes scolaires sont visées par ce raisonnement, et ce, considérant la preuve administrée quant à l’entente signée entre les parties.