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Février 2023

Article mis à jour le: 5 juin 2023

Dans une actualité juridique précédente, nous discutions d’une décision rendue par la Cour d’appel ayant permis d’appeler d’une décision de la Cour du Québec ayant retenu la responsabilité personnelle de deux administratrices, soutenant, comme moyens de défense, avoir agi dans le cadre de leur mandat et n’avoir commis aucune faute distincte de celle de la personne morale du Syndicat.

Ce sont les mêmes principes que la Cour d’appel vient, de nouveau, appliquer en matière de copropriété.

La Cour d’appel énonce qu’il est bien établi que l’administrateur est le mandataire de la personne morale. En vertu de l’article 321 C.c.Q., il doit, «  dans l’exercice de ses fonctions, respecter les obligations que la loi, l’acte constitutif et les règlements lui imposent et agir dans les limites des pouvoirs qui lui sont conférés ».

La responsabilité personnelle d’un administrateur ne peut être retenue qu’en cas de contravention aux devoirs imposés par la loi et que si un préjudice est causé au syndicat ou aux copropriétaires. La faute de l’administrateur doit par ailleurs être distincte de celle du Syndicat. Pour être retenue, elle doit être commise « à titre personnel ou en dehors de [ses] fonctions habituelles d’administrateurs ».

Les administrateurs engagent notamment leur responsabilité personnelle en cas de malhonnêteté ou de mauvaise foi. Lorsqu’ils agissent à l’intérieur de leur mandat, ils le font pour la collectivité des copropriétaires. Ainsi, on ne peut pas rechercher la responsabilité personnelle des administrateurs en leur reprochant les mêmes gestes qu’au Syndicat. Il faut alléguer une faute distincte.

Cette décision de la Cour du Québec, division des petites créances, rendue le 11 janvier 2023, s’inscrit de manière parallèle à un jugement de la Commission d’accès à l’information du Québec (« Commission ») rendu en 2020 [1] dans le cadre du même conflit.

À l’époque, nous avions commenté ladite décision, portant sur les caméras de surveillance en copropriété divise et l’impact de celles-ci sur le respect de la vie privée des copropriétaires. La Commission avait alors reçu une plainte du demandeur, Yacine Cherif, (« M. Cherif ») et avait mené une enquête.

caméras de surveillance copropriété

Il avait été conclu que les caméras de surveillance dirigées vers le toit qui couvre la piscine, la terrasse et le chalet urbain de l’immeuble administré par l’Association des propriétaires du Lowney 1 (« Syndicat ») ne respectaient « pas les dispositions de la Loi sur le privé en recueillant en continu les renseignements personnels des résidents et de leurs invités qui se trouvent à la terrasse par le biais d’une caméra de surveillance ». La Commission avait donc ordonné au Syndicat de repositionner la caméra, et ce, de manière à ne pas filmer en continu les personnes se trouvant sur la terrasse (uniquement).

Ne ménageant pas les recours contre son Syndicat, M. Cherif, avait également déposé une réclamation en dommages moraux et punitifs alléguant une violation intentionnelle et illicite de sa vie privée. C’est l’objet du présent jugement. M. Cherif après avoir fumé avec ses invités dans le chalet urbain de sa copropriété reçoit, du Syndicat, une amende de 350 $.

Suite à la réception de la pénalité en question, il conteste l’amende reçue et reproche au Syndicat d’avoir visionné, sans droit, les enregistrements des caméras de surveillance afin de trouver le ou les contrevenants au règlement de copropriété (des mégots de cigarette ayant retrouvé dans le chalet urbain).

Afin de prendre position, la Cour rappelle qu’elle n’est pas liée par la décision prise par la Commission. Elle juge qu’il n’existe pas d’expectative de vie privée dans une partie commune comme le chalet urbain qui est un endroit public (sujet au regard de tous les copropriétaires et des voisins) aussi importante que dans une partie privative.

Elle souligne que le Syndicat, ayant le devoir d’assurer la conservation et la sécurité des parties communes (1039 C.c.Q.), est justifié de visionner les enregistrements afin d’assurer que les règlements soient respectés. « Le Tribunal conclut que ce que le demandeur qualifié d’atteinte envers lui, est bien minime et se justifie dans le contexte. » Conséquemment, le Tribunal, en bloc, rejette la réclamation du demandeur.

Cette décision remet en question l’affirmation de la Commission à l’effet qu’une partie commune serait le prolongement d’une partie privative (entraînant par le fait même une expectative de vie privée). Qu’en est-il ?

Sans prendre position quant aux deux jugements susmentionnés (et leurs circonstances particulières), il nous semble que les parties communes d’une copropriété sont effectivement le prolongement des unités privatives la constituant. De la même manière qu’une expectative de vie privée existe pour un propriétaire profitant de la cour arrière de sa maison, le copropriétaire s’attend lui aussi à bénéficier d’une certaine intimité lorsqu’il profite des installations de l’immeuble hors de son unité, spécialement les parties communes à son usage restreint personnel.

Cette intimité doit, cependant, s’arrimer, aux limitations propres à la copropriété. La modalité particulière de propriété que constitue la copropriété divise limite le droit de propriété classique de chaque propriétaire divis. Les droits des propriétaires divis doivent, dans certains cas, céder le pas à ceux de la collectivité, représentée par le Syndicat [2]. L’objet du Syndicat inclut de souscrire à des couvertures d’assurances [3] et de s’assurer de protéger les personnes et les biens [4], notamment, contre les risques d’incendie.

Selon son article 1er, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé (« Loi sur le privé ») est une déclinaison aux entreprises privées des articles 35 à 40 C.c.Q. La vie privée peut être atteinte lorsque la loi l’autorise [5]. Ici, le Tribunal a estimé que cette atteinte était minime et surtout fondée sur l’objet même du Syndicat, tel que défini à l’article 1039 C.c.Q. .

[1] Association des copropriétaires du Lowney II, 1016883-S, 19 octobre 2020 (Commission d’accès à l’information du Québec).  

[2] Société d’habitation et de développement de Montréal c. Bergeron, 1996 QCCA 5767

[3] Art. 1073 C.c.Q.

[4] Desfossés c. Syndicat des copropriétaires les Jardins du Havre2021 QCCQ 8550.

[5] Art. 35 C.c.Q.

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